« Oui, et alors ? » : une question de la communication scientifique bénéfique pour les chercheurs

Nous, les chercheurs, ne pouvons-nous empêcher de poser la question : « Oui, et alors ? » concernant le produit de nos recherches. Sans cela, nos confrères ou le grand public sont susceptibles de la poser une fois le produit de nos recherches rendu public. Cette question nous pousse à réfléchir à comment (ou dans quelle mesure) la recherche pourrait contribuer à résoudre des mystères (quelles sont les « causes » après les faits ?) ou des problèmes (quels sont les « effets » requis avant les faits ?). Nos confrères (chercheurs scientifiques) pourraient se concentrer principalement sur la première partie de la question, tandis que le grand public (profane) est plus susceptible de se focaliser sur la seconde, c'est-à-dire la résolution de problèmes. Ainsi, si nous devons communiquer au sujet de la recherche ou de la science auprès du grand public, nous devrions pouvoir répondre à la question « Oui, et alors ? » en termes de résolution de problèmes, et non simplement en termes de résolution de mystères. Autrement, la communication scientifique publique a peu de chances de susciter l'intérêt du grand public (Kim, 2007). En l'état actuel des choses, nous, les chercheurs, sommes plus susceptibles de prêter attention à un problème situationnel qu'au problème comportemental. Ce dernier correspond au problème du « comment » pour résoudre le problème situationnel. Si l'on ne résout pas le problème comportemental (Carter, 2021 : architecture comportementale), le problème situationnel pourrait ne pas être résolu. À voir les problèmes actuels du monde, c'est bien trop souvent le cas. Nous avons tendance à négliger le problème comportemental, nous contentant souvent d'avoir recours aux moyens disponibles (ex. : habitudes, rituels et normes, et notamment pratiques de communication), car il nous manque les principes du processus comportemental essentiels pour concevoir de nouvelles solutions pertinentes pour le grand public. Pour résoudre le problème comportemental, il faut concevoir des technologies procédurales et des outils. C'est la priorité avant d'inventer tout nouvel outil pour résoudre un problème situationnel du public. Tout part d'une chorégraphie de l'observation (ex. : conception) et de la mise en mouvement (ex. : performance), un travail dont on sait qu'il rendra la recherche laborieuse, mais plus solide et, à terme, plus joyeuse. Cette chorégraphie engage les chercheurs dans une construction raisonnée avec l'art, la science et les sciences humaines, comme l'illustrait Pasteur (Kim, 2020). Le problème comportemental est toujours présent, car une technologie d'outil requiert également une technologie procédurale pour pouvoir être utilisée. Nous admirons les chercheurs et les ingénieurs qui ont mis au point une solution innovante à un problème situationnel particulier. Ils sont souvent qualifiés de véritables talents ou génies nés (ex. : Edison, Pasteur). Or, ils doivent en réalité avoir fourni de nombreux efforts (« essais ») pour mettre au point une technologie procédurale efficace permettant de produire l'innovation. Malheureusement, nous, les chercheurs, sommes par ailleurs davantage préoccupés par le produit tangible ou observable que par la technologie procédurale qui le précède, c'est-à-dire la résolution du problème comportemental. Nous, les chercheurs, devrions apprécier la chorégraphie du développement de technologies procédurales. Sans cela, nous ne pouvons inventer une technologie procédurale innovante en tant que pré-solution au problème situationnel pour résoudre les problèmes qui préoccuperaient davantage le grand public. Ainsi, la question « Oui, et alors ? » est bénéfique pour les chercheurs, puisqu'elle nous pousse à développer une technologie procédurale pour optimiser la résolution des problèmes et, à terme, produire une meilleure solution au problème situationnel. Carter, R. F. (2021). Behavioral foundations of effective problem solving. Consulté le 29 août sur http://bfeps.org Kim, H.-S. (2007). PEP/IS : A new model for communicative effectiveness of science. Science Communication, 28(3), 287-313. doi : 10.1177/1075547006298645 Kim, H.-S. (2020). Realizing interdisciplinarity among science, humanism, and art: A new paradigmatic explication of community problem solving. Asian Communication Research, 17(3), 20-54. doi : 10.20879/acr.2020.17.3.20