Comment pourrait-on intégrer les communications populaires avec la communication scientifique de manière innovante et productive, et au service explicite d'une justice sociale et d'un objectif de développement ? Dans le contexte des vastes inégalités et de la souffrance sociale en Afrique du Sud, la science ne peut être traitée comme un élément abstrait de la société ; au contraire, sa pertinence devrait être démontrée quant à de nombreux aspects de la vie quotidienne, ainsi qu'aux opportunités qu'elle offre d'amélioration de cette dernière. S'il est utile d'approfondir la compréhension de la manière dont la science est abordée et comprise par le citoyen lambda [le cadre de la « compréhension publique de la science » (Bucchi and Trench, 2014; Metcalfe and Riedlinger, 2019)], au regard des nombreux écueils auxquels la majeure partie des Sud-africains ordinaires sont confrontés dans leur vie, ils sont susceptibles d'encourager et de s'intéresser aux sciences qui concernent les problématiques dont ils estiment qu'elles jouent directement sur leur bien-être. Ainsi, la recherche reposant sur des problématiques, ancrée dans le contexte social et politique, reste largement nécessaire pour passer d'un « déficit » à un « dialogue » en rapprochant les sciences pertinentes, conçues autour de problématiques, du public par le biais d'une « relation démocratisée » (Weingart et al., 2020 : 4). Ce type d'approche est crucial pour trouver des moyens d'ériger une passerelle entre les innovations scientifiques et l'opinion publique et les politiques afin de faire face aux enjeux de taille qui définiront la recherche et l'expérience en Afrique du Sud, en Afrique et dans l'hémisphère sud au 21e siècle. Ces enjeux peuvent être regroupés en trois catégories globales : le changement climatique, la qualité de vie et l'équité. Pour illustrer ces enjeux, ainsi qu'une partie des opportunités de communication associées, je m'intéresse à un exemple clé de nouvelle forme de régénération urbaine écologique fondée sur la science dans le centre économique et la plus grande ville d'Afrique du Sud : Johannesbourg. Le projet Upper Jukskei Rejuvenation vise à désintoxiquer et à reverdir le seul fleuve pérenne de Johannesbourg, qui prend sa source sous la ville et est extrêmement toxique. Il vient en effet impacter les populations et la nature évoluant sur les rives jusqu'à son confluent dans l'océan Indien, au Mozambique. Les activistes qui mènent ce projet ont dû innover en créant des stratégies intégrant, de manière créative et audacieuse, collecte de données scientifiques, art public, relations publiques et mobilisation de la population. Cette étude de cas offre différents points de référence pour étudier la manière dont les connaissances en sciences naturelles et l'innovation scientifique sont couvertes par les médias et explorer comment les communications populaires autour du développement durable urbain peuvent servir d'outils d'éducation scientifique créatifs.