Qu’attendre de la rencontre public-chercheurs ? Retour d’expériences d’une médiatrice scientifique

  Elise CELLIER-HOLZEM, micro-entreprise, France

Depuis presque 10 ans, je travaille sur différents dispositifs de rencontres public-chercheurs. J’accompagne des chercheurs dans la vulgarisation de leurs travaux et la préparation de la rencontre qu’ils vont vivre avec le public. Que ce soit dans le cadre de l’Experimentarium, de la Nuit des chercheurs ou d’autres évènements, l’objectif de ces rencontres est de provoquer un véritable dialogue entre chercheurs et public. Le chercheur n’est pas là pour « éduquer » et le public pas là pour « apprendre ». L’idée est de placer les acteurs dans une situation qui permette un échange réciproque dont le contenu ne peut pas être entièrement décidé à l’avance.
En 2017 et 2018, j’ai collaboré au travail de Frédéric Naudon, chercheur en sociologie. Ce dernier articulait sa recherche autour de deux questions : (1) est-ce que des profanes peuvent bousculer le regard que le chercheur porte sur son propre domaine de compétence, (2) peuvent-ils être acteurs de la réflexion, sources de questionnements et de propositions ? Mon rôle consistait à préparer les chercheurs et à animer des réunions de travail entre eux et un public profane. Ces dernières s’articulaient autours d’une question ouverte dont le chercheur n’avait pas la réponse.
Je souhaiterais dans cette communication proposer un retour d’expérience de ce travail car ce projet m’a amené vers une démarche réflexive en questionnant ma pratique de médiatrice scientifique, en particulier sur ce que l’on peut attendre de la rencontre public-chercheurs. Comment faire sortir le chercheur de sa posture de présentateur de science pour toucher des couches plus profondes ? Comment la rencontre avec un public non-spécialiste peut l’amener à une posture réflexive ? Comment le préparer à cela ?
Les pistes de réflexion seraient à mon sens de travailler sur les attentes du chercheur dans sa rencontre avec le public. Creuser son vécu, ses envies, ses doutes. Lui montrer que cet exercice serait, et peut être même en premier lieu, bénéfique pour lui-même. En outre, pour arriver à un véritable dialogue, il me semble important de travailler sur les postures (celles des chercheurs comme celle du contexte spatial de la rencontre) et sur le fait de conférer au public une légitimité et une importance dans ses interventions. (Re)penser la rencontre public-chercheur amène également à la réflexivité chez nous les médiateurs scientifiques. Finalement quel est notre rôle dans ce type de dispositif ? À mon sens, si l’objectif est d’arriver à une réflexivité du chercheur, nous avons un rôle crucial dans le fait de l’aider à « déplier son intimité », d’être présent à ses côtés pour rendre « la bousculade » de la rencontre plus douce.
Ces réflexions me semblent utiles et nécessaires notamment pour des dispositifs de sciences participatives, mais plus généralement dans les relations à créer ou recréer entre science et société.

Remarque : cette communication est liée à celle de Frédéric Naudon, chercheur en sociologie.