Jean Pierre GIRARD, UMR 5133 Archéorient, France
Les sciences participatives marquent la ré-émergence du public comme acteur, et non cible plus ou moins assujettie, de la production et du discours scientifiques. La recherche culturelle occupe une place à part pour leur expérimentation ; elle est en effet l’un des domaines ou l’amateur, redevenu « celui qui aime », peut être à la fois le sujet qui étudie mais aussi le support de l’objet d’étude : ce qui l’a forgé (patrimoines, Cueille et Serna 2020) ou ce qui le constitue (ses pratiques, Cristofol et Sinclair 2020) en tant qu’être humain – lui ou ses pairs –.
Peut-être du fait de cette tension intrinsèque, les rôles que le public amateur peut jouer dans la palette d’actions menées en recherche culturelle couvrent un très large spectre, de l’acteur volontaire de pleine capacité, partie prenante d’un processus co-construit, à l’opérateur d’un protocole de recueil de données très contrôlé, dans un programme de recherche dont l’essentiel lui échappe (Chlous et Luneau 2020).
Une série d’exemples, issus du réseau Particip-Arc, organisateur de ce symposium, permettra d’illustrer cette variété de situations. La force de ce réseau est de faire « vivre ensemble » des disciplines, des pratiques et des dispositifs très hétérogènes à tous points de vue ; nous aborderons trois aspects essentiels de la mise en œuvre d’un projet de science participative.
Tout d’abord, l’amateur opère « hors les murs » des institutions scientifiques et au moyen de dispositifs, souvent numériques, qualifiés de « participatifs » (alert-archeo.org), « contributifs » (recherchecontributive.org) ou « citoyens » (Montembault 2015) ; nous montrerons que l’adjectif utilisé n’est pas neutre et recouvre des positionnements respectifs particuliers pour les différents acteurs du processus.
Ensuite, dans la pratique, l’amateur – isolé ou organisé en collectif – collecte (Aubry 2014, locusonus.org), observe et met en forme (Chupin 2016, Perrin 2019), propose ou crée des données (finds.org.uk), des états (Matuszewski et al. 2020) ou des savoirs (Boula de Mareüil 2020) ; là encore, selon les objectifs et le modus operandi du dispositif et selon les rôles respectifs joués dans celui-ci par les scientifiques et par les autres participants, les enjeux épistémologiques ne seront pas évoqués dans les mêmes termes.
Enfin l’amateur, en prenant part au processus, prend part à sa création de valeur, intellectuelle et, parfois, tout-à-fait matérielle (économie sur le coût de la main d’œuvre, « valorisation » de la recherche, etc.) ; nous verrons que la reconnaissance de cette valeur apportée compte (Fort 2015) – sa proclamation autant qu’une contrepartie tangible –.
In fine, ce qui est en jeu dans ces trois interrogations, c’est la place symbolique des acteurs les uns par rapport aux autres. La variété de points de vue présents au sein de Particip-Arc permettra de montrer que la réponse à cette question n’est en rien triviale et que les savoirs ne circulent pas toujours dans le sens que l’on imagine.
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